Les violences basées sur le genre en situation de crise sociale: cas des camps des réfugiés du Cameroun.

Depuis quelques années, le Cameroun traverse une situation de crise sociale générée par des revendications, des attaques terroristes et des conflits inter tribaux. A l'issue de cette guerre, plusieurs sortes de violences sont enregistrées. D'où nous faisons appel à la notion de Violence Basées sur le Genre, en abrégé VBG. Comment se présente la notion de VBG dans les parties touchées ? Les victimes de ce fléau sont-elles bien prises en charge dans leur structure d'accueil ? 

Qu'est-ce que les Violences Basées sur le Genre ( VBG) de façon générale ?

Définies comme actes préjudiciables perpétrés contre une personne ou un groupe de personnes, les VBG sont caractérisées par deux grands aspects à savoir : l'aspect fondamental, considéré comme une violence nécessaire, fondé de façon à apporter une ère nouvelle ou du positivisme dans la vie d'une personne. L'aspect agressif quant à lui, vise à infliger des souffrances ou coups durs  à une communauté ou personne. Le second aspect se caractérise par des violences physiques, sexuelles, psychologiques ou émotionnelles et sociales.

Qui sont les victimes et d'où viennent-elles ?

En raison des problèmes d'instabilité sécuritaire, sanitaire et alimentaire transfrontaliers, nombreuses sont ces victimes qui se retrouvent sur la terre camerounaise par voie migratoire. En 2018, le HCR a estimé au moins 242000 personnes déplacées internes et 1000000 réfugiées au Cameroun, d'où 85800 d'entre eux proviennent de la RCA, 8300 pour le Tchad, 2900 au Nigeria, 1400 du Rwanda, 800 de RCA et 800 pour les autres pays non identifiés. Ces déplacés sont constitués d’hommes, de femmes et d’enfants. Dans ce cas d'espèce, la barre sera hautement accentuée sur la gent féminine. Celle-là qui est considérée comme l'incarnation de différentes violences que l'âme appelle au secours. Des filles-mères,  des jeunes filles pubères, des veuves et orphelines, voilà les statuts de ces femmes analphabètes qui n'ont pas d'éducation, mais avec un brin de retenue ont une éducation formelle. On les retrouve à l'Est dans les camps de Gado, Bazere et Bazou . Le camp de  Minawao à l'extrême Nord. 

Toujours en 2018, face aux problèmes humanitaires causés par Boko Haram, l'UNRCH estime que plus de 3768 nouveaux ont été enregistrés au camp de Minawao à l'extrême Nord. La population totale du camp s'élève à 62910 réfugiés nigérians, dont 60% de la population ont moins de 18 ans et les femmes/filles représentent 54% de la population totale du camp. Le souffle de vie coupé des femmes qui vivaient dans ce camp hier, est comparé à l'exécution de l'hymne national pour tout type d'événement d'aujourd'hui  et de demain. Elles se trouvent dans une situation d'incarcération psychologique et de vie limitée.

Le vécu quotidien des victimes dans ces camps 

Compte tenu de la population cosmopolite qui cohabite dans un endroit parfois trop étroit, on note une promiscuité qui prend de plus en plus d’ampleur dans une société en dérive. Ces réfugiés, qu'ils soient femmes, hommes ou enfants, sont victimes de plusieurs maux qui font en sorte que ce camp représente pour eux, ce que l'écrivaine camerounaise Yaoudam Elisabeth a qualifiée de : " Prison psychologique'' dans Littératures Orales Africaines : transmission, réception et enjeux pédagogiques. Ils sont confrontés aux problèmes d'adaptation dans ces lieux d'accueil, qui les privent de leurs activités quotidiennes telles que : les travaux champêtres, chasses, pêches, commerce et bien d'autres activités génératrices de revenus. Ainsi, cet acte permet de remettre en question la notion ''de l'autonomisation financière de la femme et la paix  au le XXIe siècle'' amorcée par l'ONU en 2005 et 2010 à New-York. Ôtés tout de même du droit de vivre en famille, car nombreux se retrouvent détachés de leurs familles et entourage dans cette terre nouvelle. Ce détachement est causé soit par la mort, soit par le fait que chacun y va de soi, afin de sauver sa vie. Ils sombrent dans les moments les plus difficiles de leur vie. De la stigmatisation, au chômage, à la perte d'estime de soi, culpabilité en passant par le stress post-traumatique, ces réfugiés consument à petit feu le martyr pouvant occasionner la mort lente de l'âme, par la violence psychologique présente dans ces locaux. Dans ces moments de frustration, de peine, de douleur, les femmes et filles sont davantage livrées à la violence physique et sexuelle. Cette dernière se justifie par la croissance poussée des grossesses, de prostitution appliquée et générée par les agents du corps armée et les agents de sécurité, sous menace de bastonnade et de privation. Il leur est presque impossible de manger à leur faim, à cause de leurs effectifs et de l'insuffisance des denrées alimentaires. Impossible d'étancher leur soif car le précieux liquide se fait rare et parfois inexistant. La prise en charge sanitaire et corporelle est négligée. Les maladies et saletés deviennent leurs alliés. 

Que font-ils pour surpasser ces moments de troubles ?

Face à cette situation alarmante, certains expriment leurs malaises par des pleurs, question d'apaiser le cœur. Les chants traduisent les douleurs dont sont victimes ces femmes. Les jeux de cartes et de ludo permettent d’oublier un instant  les soucis. Parmi elles, beaucoup de femmes aspirent à la reconstruction en espérant reconquérir le temps perdu. Cependant, il est nécessaire d'avoir recours aux soutiens et aux aides.

La gestion des cas des victimes

Elle est considérée comme une méthode d'intervention reposant essentiellement sur une démarche de prévention,  d'anticipation, de conciliation et de réparation. Le premier pas à faire ici, est de prêter une oreille forte à ces victimes. Car c'est en écoutant qu'on décèle le mieux les besoins et problèmes, c'est en écoutant qu'on comprend  pour mieux orienter. Cette gestion peut se faire par la sensibilisation, l'éducation de masse, l'accueil et l'accompagnement des victimes ainsi que  le  counselling. Ces étapes contribuent à soigner le mal psychologique de ces victimes. La réinsertion socio- économique et les visites de suivi post- guérison afin de les combler du vide saillant sont aussi des étapes non négligeables. 

Les responsables de ces camps doivent solliciter les aides ou financements des ONG( PAM, OMS,HCR, ONU-Femmes...) et instances régionales des Ministères (les affaires sociales, la police, la justice, centre de santé) et autorités traditionnelles et religieuses.

Apporter son soutien aux victimes de violences basées sur le genre en situation de crise est considéré comme un acte charitable dont tout le monde doit bénéficier même par le fait de tenir compagnie à ces personnes par des mots de réconfort. Car notre contexte africain nous enseigne que la meilleure façon de recevoir un étranger, c’est de lui offrir un accueil chaleureux. De plus, une vie sauvée  est synonyme d' une société en pleine floraison.

Par Dr Jessica SECBE et Nadia YADJI,
Ambassadrices NVC au Cameroun

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