Violence sexuelle envers les filles et les femmes

Une arme de guerre en RDC depuis deux décennies

Les conflits armés et intercommunautaires sont devenu monnaie courante dans plusieurs pays d’Afrique, cette situation est à la base d’agressions sexuelles et de violences basées sur le genre dans ces zones en conflits.

La femme africaine, déjà vulnérable en temps de paix, paye un lourd tribut à la guerre. Les conflits armés, les exodes et le déracinement résultant des migrations entraînent une hausse importante des diverses formes de violences sexuelles. Ces dernières décennies, les viols commis durant le génocide au Rwanda et au cours des guerres au Burundi, au Libéria et plus actuellement en RD Congo ont fait l’objet d’une attention croissante de la communauté internationale sur le taux des agressions sexuelles.

Les conséquences inéluctables de guerres cycliques dramatiques

Les Guerres cycliques qui ont élu domicile dans la partie Est de la RDC ont renforcé la vulnérabilité des femmes et des jeunes filles face aux violences sexuelles utilisées d’autre part comme arme de guerre. Depuis plus de 25 ans, les violences sexuelles prospèrent dans le sillage des conflits qui déchirent le pays et les viols ne se résument pas à une fatalité de la guerre. Face à ces violences endémiques, la stigmatisation et l’insuffisance de prise en charge restent un lot de la majorité des victimes.

Dans le rapport annuel 2022, le ministère de la santé congolais recense quant à lui plus de 30 000 cas de violences sexuelles au cours de deux dernières années, le Nord Kivu et l’Ituri étant des zones en proie des multiples conflits armés enregistrent une augmentation alarmante des cas de violences sexuelles et l’état de siège a aussi aggravé le taux de violence, qui a atteint 80 % en 2021. Plus de cent soixante filles âgées de 13 à 17 ans ont été victimes de viols et grossesses précoces dans le territoire de Lubero, au Nord-Kivu, entre fin 2020 et juin 2021.

Comment les violences sexuelles sont-elles utilisées comme arme de guerre à l’est de la RDC ?

L’Est de la RD Congo est une zone en proie aux agresseurs ennemis à cause de ses ressources naturelles et plusieurs pays voisins menacent l’intégrité territoriale de cette partie. Cette situation est à la base de plusieurs conflits armés entre les Forces Armées de la RDC (FARDC) et les groupes armés étrangers et locaux. Ainsi pour forcer le gouvernement congolais à céder à leurs réclamations et ou revendications, ces groupes armés utilisent non seulement les armes à feu mais aussi les violences sexuelles faites aux femmes et filles comme arme de guerre.

Depuis la mi-2022, de nouveaux affrontements en province du Nord Kivu entre les FARDC et le groupe rebelle M23 ont occasionné des déplacements massifs internes de plus de 300 000 personnes enregistrées. Parmi ces déplacés, 75% sont des femmes et des enfants et les territoires de cette province sont sous occupation des rebelles M23. Après le processus de paix de Nairobi 3, une force régionale de la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) a été déployé dans les zones non occupées par les rebelles en vue de sécuriser la population dans les territoires non occupés. Ces mouvements massifs de la population, cette occupation par les rebelles des territoires de la RDC et la multiplicité de forces armées dans cette région a aussi accentué le nombre de victimes de violences sexuelles chez les filles et les femmes en plus d’accroître l’insécurité.

Dr Justin Paluku, gynécologue-obstétricien à l’hôpital de l’ONG Heal Africa de Goma affirme recensé à peu près 5 000 femmes violées depuis le début de l’année sur tout le Nord-Kivu.

Une forte proportion de victimes de violences sexuelles s’identifie comme étant des personnes déplacées dont   39 % de cas des victimes seulement prises en charge. Certaines d’entre elles ont été agressées dans des lieux où elles devraient être protégées contre la violence, comme dans les camps de personnes déplacées. D’autres le sont au cours de leurs déplacements soit par des rebelles, soit par des militaires et ou par les membres de la communauté, lorsqu’elles sont en quête de nourriture pour leur famille. 

Quels sont les conséquences de violences sexuelles en tant de conflits ?

La guerre n’a jamais été une bonne option pour régler les différends entre les Etats et ou entre les communautés. Durant les conflits les femmes et filles sont les premières victimes de violences sexuelles et celles basées sur le genre. Les conséquences de violences sexuelles ne passent pas inaperçues chez ces femmes et filles victimes :

• Sur le plan physiologique, l’hypersexualité, la baisse de désirs, relations douloureuses, les risques de fausses couches, maux de tête et de maux de dos,

• Sur le plan socio communautaire, elles sont stigmatisées et discriminées, elles sont isolées dans la communauté.

• Sur le plan économique : Dans les zones rurales où les routes sont impraticables pour l’assistance humanitaires les victimes font face aux Coûts associés à l’intervention policières, aux services juridiques et correctionnels, aux services de consultation et maisons de transition.

Des femmes attendent à l'entrée de l'hôpital de Panzi du docteur Mukwege, spécialisé dans le traitement des victimes de viol, novembre 2009. AFP/ADIA TSHIPUKU

Viols en RDC : la croisade du Dr Mukwege (lemonde.fr)

Quelles solutions pour éliminer les agressions sexuelles envers les filles et les femmes à l’Est de la RDC ?

En cette journée internationale de l’élimination de la violence sexuelle en temps de conflit et en cette période post forum génération égalité, nous voulons encore amplifier les cris d’alarme en faveur de toutes ces victimes de violences sexuelles dont le nombre augmente chaque jour depuis plus de deux décennies dans la partie Est de la RDC, ainsi nous proposons ce qui suit :

  • Mettre en œuvre la Résolution 1325 du Conseil de Sécurité des Nations Unies sur : Femme, Paix et Sécurité dans les zones affectées par les conflits armés dans la partie Est du pays,

  • Promouvoir la paix sur tout le territoire congolais par de dialogue et processus de paix entre les différentes parties prenantes aux conflits sans oublier la participation active et effective des femmes, en vue de la protection des femmes et filles contre les violences sexuelles en temps de conflits armés,

  • La prise en charge des victimes sur le plan psychologique : elles sont contraintes à la dépression, la colère, la culpabilité, le manque d’estime de soi, la peur, la tentative de suicide, le stress post traumatique, la victimisation, la dépendance envers les autres pour un soutien, l’hyper vigilance etc…

  • Une volonté politique forte pour faire respecter les droits humains et particulièrement les droits des jeunes filles et des femmes ainsi que les différentes politiques et lois qui protègent les filles et les femmes contre les violences sexuelles pendant les conflits,

  • Mettre en œuvre le Programme de Démobilisation, Désarmement et Réinsertion Communautaire et Socioéconomique (PDDRCS) des membres de groupes armés locaux,

  • Appliquer la justice transitionnelle et réparatrice en faveur les victimes de violences sexuelles pendant cette période de conflits armés,

  • Appuyer les organisations de la société civile sur la mobilisation et l’engagement communautaires par a vulgarisation des textes légaux qui protègent les femmes et filles contre les violences sexuelles et réprimandent les auteurs de viols.

  • Engager la redevabilité de la communauté internationale envers l’Etat congolais pour la protection des filles et des femmes contre les crimes sexuels,

  • Engager la redevabilité de la Mission des Nations Unies pour la Stabilité au Congo (MONUSCO) en place depuis plus de 20 ans envers le peuple congolais .

La journée du 19 juin est importante pour rappeler que la violence sexuelle en temps de conflit est un crime de guerre et une violation des droits de l’homme. Il est important que nous travaillions ensemble pour mettre fin à cette violence et aider les survivantes à se remettre de leurs traumatismes.

Suivez Nos Voix Comptent sur les réseaux sociaux et les médias et devenez membre afin d'amplifier les besoins et priorités des filles et femmes d’Afrique subsaharienne francophone.

Par Deborah MUPITANJIA, ambassadrice NVC de la RDC

Précédent
Précédent

Regardez le webinaire du 23 juin 2023

Suivant
Suivant

Du Forum Génération Égalité au groupe de travail